Rencontre avec Eddy Ape, créateur du smooth banger et jeune artiste Bruxellois qui inspire un vent de positivité dans le rap francophone. 

La capitale belge est probablement l’un des principales viviers de talents artistiques depuis une décennie. Engorgé par un grand nombre de culture, bruxelles exerce une dynamique sur le rap francophone très diversifiée. Ce qui a évidemment créé des carrières folles comme celle de Damso ou Hamza. Plus récemment de nouvelles têtes commencent à émerger à l’image de Frenetik ou Bakari. Mais celle qui nous intéresse aujourd’hui se nomme Eddy ape. Depuis quelques années, l’artiste belgo-congolais dévellope une esthétique mêlant la finesse et l’énergie tout en proposant des lives sessions qualitatives. Plongez ci-dessous dans sa façon de pensée et son univers créatif.

Qui es-tu Eddy ape ? 

Moi c’est Eddy Ape et je suis bruxellois. Je suis un artiste belgo-congolais et je fais du Hip-Hop, même si je me définis plus dans un style que j’ai développé qui s’appelle le smooth banger. J’ai toujours été inspiré par la soul, le R&B et le jazz et j’essaye d’intégrer cela dans ma musique. Je viens aussi d’un collectif qui s’appelle La Mesure inversée, 

Qui sont les artistes qui t’ont marqués au sein de ta vie ?

Je ne suis pas rentrée de la manière la plus classique dans le rap. J’ai commencé à m’y intéresser quand j’ai découvert « À 30% » de Maître Gims donc ce n’était clairement pas des références rap mais plus de la variété française. Le premier amour que j’ai eu avec la musique est Henri Salvador, c’est lui qui m’a beaucoup marqué dans ma jeunesse. Maintenant je suis beaucoup inspiré par ce qui se fait aux states. Notamment par tout le mouvement Dreamville et Erykah Badu. En termes de performance live, Tyler The Creator m’impressionne, ce type à quatre cerveaux et sa dernière performance au Rolling Loud m’a choqué. 

Est ce que tu connais D Block Europe…

Je sais déjà ce que tu va me dire (rires)

Je trouve que tu ressembles beaucoup à Young ADZ physiquement (rires). 

Tout le monde me le dit, j’ai reçu plein de messages sur Instagram par rapport à lui. Ce n’est pas quelqu’un que j’écoute forcément mais je sais qu’il a collaboré avec Oboy et Hamza. On m’a aussi dit que je ressemblais à Ghali quelques fois. Cependant c’est purement physique, leur musique n’est absolument pas ressemblante à la mienne. 

On parlait de Hamza un peu avant, qui est clairement l’une des têtes d’affiches du rap belge maintenant. Comment situe-t-on le rap de ton pays actuellement par rapport à la France ?

La scène musicale belge se positionne un peu comme des “jean foutiste”. Que ce soit dans la communication de Hamza, le second degré de Roméo Elvis ou Caballero & JeanJass et les textes de Isha. Je pense que cela définit assez notre scène. Après, au niveau des inspirations je pense que l’on est inspiré par les mêmes choses mais nos flows et nos processus de création sont totalement différents. Nous ne sommes pas si éloignés de la scène française mais on apporte notre petite touche belge for sure. 

Et justement de qui es tu proche dans le rap belge ?

La Belgique est un petit village en fin de compte. Si tu fais les choses, tu rencontres rapidement du monde lors de festivals ou en studio. Bruxelles est le centre et tu rencontres facilement des gens de Liège, Charleroi ou Bruges. Ce n’est pas comme en France ou tu as des scènes un peu partout, ici tout va très vite. Mais attention cela reste du rap, c’est compétitif même si on se soutient entre belges. 

Tu as récemment livré une première release party, quel est ton rapport au public ?

Pour moi le rapport avec le public est quelque chose de primordial. Ce n’est pas moi qui juge ma musique mais uniquement les auditeurs donc c’est très important d’avoir un lien avec eux. Même avec les soucis du Covid, j’ai réussi à remplir ma salle et je ne sais pas si cela aurait fonctionné si je n’entretiens pas ce lien la. Lors des concerts j’essaye de communier au maximum, je veux qu’on passe un bon moment. C’est comme cela que j’évolue aussi car le public te tire vers le haut. 

C’est peut-être cela qui définit la nouvelle génération dont tu fais partie en fin de compte. 

J’ai plutôt l’impression que c’est une question de notoriété. La plupart des artistes qui deviennent connus s’éloignent rapidement de leur public. Ils viennent faire leur concert et ils se cassent. Il y a cependant des exceptions comme Drake qui est super proche de son public ou Tyler The Creator. J’ai d’ailleurs une anecdote par rapport à lui.

Dis nous tout.  

Lors du festival des Ardentes en 2016, je me préparais pour mon concert et j’avais envie de choper de l’énergie. Donc je suis allé voir le concert de Tyler. Le truc c’est que son Dj avait un problème et durant 15 minutes, impossible de faire marcher le son. Au lieu de partir pour revenir débuter le show, il est resté sur la scène pour parler avec son public. Il a même organisé un mariage, cela n’avait aucun sens. 

Comment définirais tu le smooth banger, le style que tu as créé ?

A la base tout cela est parti d’une erreur. Auparavant je pensais être différent de la scène belge par ma faculté à chanter et à rapper en même temps. Ce qui est faux bien entendu. J’ai ensuite compris que ma différence se puisait dans mes inspirations. Ainsi quand j’attaque un morceau, qu’il soit basé sur du zouk ou de la drill, je le transforme grâce au smooth banger. J’arrive à intégrer une certaine finesse dans de l’énergie en fin de compte. 

Ton dernier projet se nomme Supernova, que veux-tu montrer avec ce titre ?

Le projet devait s’appeler Ape World II à l’origine. Mais tout à été chamboulé par le covid. Cette période à vraiment été dure car je suis tombé malade et tous mes concerts ont été annulés. Après cet épisode j’ai décidé de me repositionner. Je suis quelqu’un qui est assez intéressé par tout ce qui est de l’univers car j’aime cet aspect mystérieux de la connaissance. La supernova est une naissance d’étoiles qui survient après la destruction d’une autre. J’ai voulu montrer à travers ce titre qu’il faut sortir d’une sorte d’extinction pour ensuite briller. A partir du moment où tu ne vois pas l’échec comme une défaite tu peux toujours rebondir. 

L’autodérision est assez présente dans ta musique, tu arrives à vraiment parler de tout comme par exemple la perte de ton permis de conduire. 

C’est une question d’authenticité et cela permet de te rapprocher plus facilement de ton public. Même dans les morceaux ego-trip j’ai besoin de caler de l’autodérision, ça fait partie de mon personnage. Après c’est peut-être aussi inconscient de ma part parfois en tant que rappeur belge. 

Est ce que tu trouves que le rap est trop sérieux parfois, qu’il faut trouver le temps de souffler ?

Oui clairement et cela est assez général dans la vie. Le confinement m’a permis de découvrir de nouvelles facettes de ma personnalité et j’ai rapidement compris que tout ce qui engendre du stress est mauvais. Donc quelque part, se prendre trop au sérieux est mauvais pour soi-même, surtout quand tu ne vit pas ce que tu dis dans tes textes. Il y a beaucoup de rappeurs qui sont tombés dans ce vice là et qui ont fini par faire des dépressions. Après il y a tout de même des artistes qui se considèrent énormément. J’ai déjà rencontré des rappeurs qui se disaient être des “prophètes”, comme quoi on entend de tout. 

Tu arrives à dénoncer des problèmes de notre société tout en restant positif sur le morceau “Katrina”, est ce une des clefs pour avancer selon toi ?

A partir du moment où tu amènes du positif, ce dernier vient à toi. C’est une des lois de l’attraction que mes parents m’ont apprises très jeunes. Même si on à galéré, qu’on nous a mis de nombreuses claques dans la vie, sortir de cela avec du positif est bien plus beau et mémorable donc j’essaye de l’être le plus au quotidien. 

Quelles sont les conditions les plus cool pour écouter du Eddy Ape selon toi ?

Je pense qu’il y a plusieurs situations. Si tu écoutes “Arc en ciel” mieux vaut être sur une plage en train de se faire masser (rires) mais tu peux aussi écouter du eddy ape lors de virées nocturnes ou avant d’aller en soirée. En tout cas, il faut toujours être posé avec ma musique. 

Tu me parlais au début de l’interview de Tyler The Creator, est ce que, comme lui, tu te vois aller plus loin que la musique en développant ton propre merchandising ?

Bien sûr et c’est bien de le citer. Lorsque j’ai sorti mon projet Ape World en 2020, j’ai sorti quelques vêtements et à ma grande surprise, certaines tailles ont été sold out en 24H. C’est là que tu vois que la proximité avec le public paye. 

Comment prépares-tu l’avenir ou plutôt où est-ce que tu te vois dans 2 ans ?

Il faut conquérir le monde mon gars (rires). Actuellement je taffe la promotion de supernova, de nombreux clips vont arriver et aussi des bonus. En tout cas il faut que je devienne “un meilleur moi”, et on n’arrêtera jamais de taffer pour ça.